Son père était de Cracovie, elle est petite fille de Cohen, cadette de ses trois frères qu’elle aimait tant.? Michèle? a 7 ans et demi. Elle est pleine d’innocence, elle joue avec ses amis devant la porte de sa maison de Neuilly-sur-Seine. Soudain, un camion s’arrête devant chez elle. Elle est la seule à porter l’étoile de David. Ils la jettent dans le camion, sous les yeux terrifiés de ses parents qui ne savent pas quand ils la reverront, puis la laissent partir, direction Drancy. Aujourd’hui, à 86 ans, Michèle témoigne dans Fréquence Juive de l’horreur qu’elle a pu vivre.

Le jour où ils m’ont? embarquée



? « A Paris, pendant la guerre, l’atmosphère était très tendue.
Nous étions quatre enfants, j’étais la plus jeune et la seule fille. Nous habitions Neuilly-sur-Seine, qui, à l’époque, n’était pas un quartier juif. Je jouais à la marelle avec des camarades de classe. Un? camion s’est arrêté et j’étais la seule à porter l’étoile de David sur mes vêtements. Ils m’ont? prise? et m’ont? jetée? comme un sac de pommes de terre dans le camion. Soudain, ma vie a complètement changé. Quelques minutes avant, j’étais en train de déjeuner avec mes parents dans la cuisine. Au moment où ils m’ont? enlevée, je voyais ma mère qui me regardait du balcon ainsi que mon père qui essayait de la retenir.

Plus tard, j’ai su qu’il avait fait cela car il expliquait à ma mère que si nous étions tous déportés, personne ne s’en sortirait. Ce qui m’a? traumatisée, c’est que, du camion qui m’emmenait à Drancy, je pouvais apercevoir des drapeaux rouges portant la croix gammée, accrochés du haut des immeubles, sur les Champs-Elysées.

? « Les allemands sont rentrés dans mon pays, ils ont tout pris. C’était un viol. » ?

La Rafle du métro



? Mon frère de 17 ans avait pris le métro pour se rendre à l’école car il pleuvait.
Les SS? ont débarqué dans une rame et ont déculotté tous les hommes. Tous ceux qui étaient circoncis ont été ramassés, juifs ou non. Mon frère a été déporté à Auschwitz et n’en est jamais revenu. Il était d’une intelligence incroyable et d’une gentillesse extraordinaire. Un de ses amis qui était avec lui dans le métro, ce jour-l? , nous a raconté, plus tard, ce qui s’était passé. Mon petit-fils de 23? ? ans me fait souvent penser à lui. ?

?

Mon frère m’a? sauvée



? Après cette perte inconsolable, mes deux autres frères avaient décidé de rentrer dans le FFI (Forces Françaises de l’Intérieur),
le maquis - résistance -, sous la direction du Général de Gaulle. Ils bombardaient les trains qui venaient d’Allemagne en France. Pendant ce temps, j’ai passé 3 mois à Drancy qui était? un? camp de transit et de triage, avant qu’ils nous transfèrent? ? dans les camps? d’extermination? nazis. Un jour, je vis l'un d’eux arriver avec un? SS? en uniforme allemand. Il avait l’air très autoritaire et il parlait très bien l’allemand. J’ai compris qu’il ne fallait pas que je parle, ni? que je? le reconnaisse. Il a ordonné de prendre avec lui deux petites filles : une petite fille de 5 ans et demi qui n’était pas juive - prise dans une rafle car son père était un prisonnier politique - et moi. C’est ce qu’il a fait sans que le? SS? ne demande aucun papier.
Le SS l’a remercié d’être venu et mon frère de répondre : « Il n’y a vraiment pas de quoi ! »
Il nous a? ? emmenées et mises? en sécurité près de Grenoble, dans un couvent. La mère supérieure était très gentille avec moi. Je me souviens des ses paroles : « Il ne faut jamais que tu dises que tu es juive, et personne ne le saura, sauf moi. » Par précaution, elle m’emmenait et venait me chercher tous les jours dans une? école communale, différente du couvent. Elle ne me laissait pas parler aux étrangers. Je savais qu'il était important que je sois à l’écoute. Je ne parlais à personne et je suis très vite devenue la meilleure de la classe. La seule chose que je ne faisais pas, c’était? de m’agenouiller.

« Nous sommes l? pour défendre les juifs, n’oubliez jamais ça ! »




Je me? souvenais :? lors du dernier seder de Pessa’h, nous étions très nombreux, et mon père? avait? dit, en tapant sur la table : « Un juif ne s’agenouille pas ! »

? « Un juif ne s’agenouille pas ! »

? Elle m’emmenait toujours à l’extérieur de l’estrade du couvent afin que je ne sois pas forcée de m’agenouiller devant le Christ. J’ai passé 13 mois dans ce couvent ; je chantais l’Ave Maria, j’adorais ça !

? ?

Les gens qui sauvent les enfants



? Des rafles sont survenues de nouveau.
En échange d’une somme d’argent - ou pas, les gens savaient qu’il fallait protéger les enfants et les prenaient en charge à leur domicile. Ceux chez qui je vivais étaient antisémites. La mère de famille me frappait tous les jours, sans aucune raison, au point que, jusqu’? aujourd’hui, je ressens encore la douleur dans la nuque. Je suis restée 14 mois, j’avais alors 10 ans et demi. Je faisais tout ce qu’elle me disait, mais pas assez vite pour elle. Mais je ne lui en veux pas, car je sais qu’il y a une autorité au-dessus de nous pour gérer tout cela. Un jour, j’entendis parler le premier ministre d’Angleterre - Churchill, disant qu’il détestait Hitler, et que les américains étaient en pourparlers pour libérer la France. Sans même savoir s’ils étaient vivants, ce jour-l? , j’ai su que j’allais rentrer chez moi et revoir mes parents.

?

La libération



Du camion qui m’emmenait à Drancy,? j'avais vu? des drapeaux rouges avec la croix gammée
? qui? bordaient les Champs-Elysées et au même endroit, des années après, à travers la fenêtre de la voiture de mes parents qui étaient venus me récupérer, c’était des drapeaux français et américains qui les avaient remplacés.? J’étais heureuse et reconnaissante. Ma vie a recommencé de manière très différente. Nombreux sont les membres de ma famille qui ont été pris dans la rafle et qui n’en sont jamais revenus. Un ravage ! Mes parents, eux, étaient restés cachés dans leur maison - couverts par un officier de la police de Neuilly-sur-Seine qu’ils connaissaient. Ils vivaient avec des lampes électriques et? des bougies, pour ne pas recevoir de factures d’électricité. Quinze ans après, mon frère a décide de partir aux Etats unis pour être danseur, puis mes parents m’ont laissé partir avec lui.

? « Je croyais que la Californie, c’était Disneyland ! Et ça l’était ! En 1956, on ne fermait pas nos fenêtres, ni nos portes à clefs. »

? J’ai rencontré mon mari ici, aux Etats-Unis, et il était aussi un survivant de la Shoah.

Pris à l’âge de 12 ans,? il? avait? perdu toute sa famille à Bergen-Belsen. Nous avons été mariés pendant 47 ans et avons eu un fils. Aujourd’hui, je suis traditionaliste et je passe les Shabbat chez mes enfants. Je suis toujours très croyante. ?

« Si le judaïsme n’avait pas été ma religion, je n’aurais pas survécu »

? ? Les enfants doivent le savoir : ?
« Nous sommes l? pour défendre les juifs, n’oubliez jamais ça ! »

Propos recueillis par Fréquence Juive avec la collaboration du Musée de L’holocauste à Los Angeles. .

Courrier des lecteurs

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Chers Lecteurs, Chères Lectrices,

Je me présente, Ilona Cazorla, nouvelle rédactrice en chef du magazine Fréquence J.

Installée depuis trois ans aux États-Unis et anciennement diplômée de Sciences Politiques, passionnée d'art, de cinéma et de littérature, je partage mon temps entre mes deux villes d'adoption, Los Angeles et New York.

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Notre mission : Trouver ce que l’on cherche ou chercher ce que l’on doit trouver ?

Inspiration selon un cours du Rav Benchetrit diffusé le 1er Août 2021 : «? Tu trouves ce que tu cherches? », sujet mis en parallèle avec l’expatriation des francophones aux Etats-Unis, qui ne serait, en fait, qu’un simple et agréable raccourci donnant un sens à nos vies.

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Herbert Avraham Haggiag Pagani, dit? Herbert Pagani? est un peintre, sculpteur et auteur-compositeur interprète de chansons italien? des? années 1970, né le? 25? avril? 1944? ? ? Tripoli? en? Libye et mort à 44 ans? ? ? Palm Springs? en? Californie? aux? États-Unis. Il repose à Tel Aviv, en Israël.
Dans plusieurs de ses chansons, il a insisté sur son identité juive (l’étoile d’or) et son soutien à Israël (Plaidoyer pour ma terre), texte qui constitue son «? credo? » philosophique.
Plus de 45 ans après, ce texte est toujours d'actualité

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